Date : 14 Mar 2025

Terrorisme au Burkina Faso : l’armée peine à contenir la menace djihadiste au nord du pays

Depuis le 30 janvier 2025, la province du Soum, située au nord du Burkina Faso, a subi sept attaques terroristes. Malgré l'acquisition de nouveaux équipements militaires, l'armée burkinabè peine à contenir l'escalade de la violence dans cette région.

Poursuite des attaques terroristes au Burkina Faso

Au Burkina Faso, les attaques djihadistes se multiplient au nord du pays, notamment dans la province du Soum. Le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (JNIM), branche locale d'Al-Qaïda, revendique ces attaques. Le 18 février 2025, la ville de Djibo a été à nouveau visée par des combattants du JNIM. Les jihadistes ont attaqué plusieurs positions militaires et pris le contrôle de trois postes au nord, sud et sud-est de la ville. Durant les combats, au moins six soldats des forces de défense et de sécurité (FDS) ont été tués. La ville de Djibo, chef-lieu de la province du Soum, est sous blocus du JNIM depuis près de trois ans.

Le 16 février 2025, un détachement de l'armée burkinabè a été pris pour cible par des jihadistes dans la ville de Séguénega. Une attaque similaire s'était déroulée le 14 février dans la ville de Dargo. Le 2 février 2025, la ville de Djibo avait déjà été visée par le JNIM à l'arme lourde, causant la mort d'une vingtaine de soldats parmi les FDS et les volontaires pour la défense de la patrie (VDP). La ville avait déjà été attaquée le 24 janvier 2025, mais les assaillants avaient été repoussés. Le 11 janvier 2025, des jihadistes avaient embusqué un convoi routier militaire près de la ville de Katchirga, tuant quatre gendarmes, 14 militaires et au moins trois civils, tandis que 14 personnes étaient portées disparues.

Les multiples attaques au nord du Burkina Faso soulignent une escalade de la violence terroriste. Une violence qui s'est désormais étendue au-delà de cette région, touchant également l'est et le sud-ouest du pays. Depuis 2015, les groupes djihadistes comme le JNIM continuent de proliférer dans la région du Sahel. Les attaques fréquentes ont causé des milliers de morts et de déplacés. Malgré les efforts du gouvernement burkinabè pour moderniser son arsenal militaire dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, les FDS ne connaissent pas de grands succès face aux combattants terroristes.

Acquisition de nouveaux matériels militaires pour les Forces Armées burkinabè

Dans sa lutte contre le terrorisme, le Burkina Faso a engagé depuis 2023 une stratégie massive de modernisation de son arsenal militaire. Dans le cadre du Plan stratégique d’équipement des Forces armées nationales, le gouvernement burkinabè a consacré 1 milliard de dollars (environ 600 milliards Francs CFA) à l'acquisition de matériel militaire en 2023, selon les déclarations du ministre de l'Économie Aboubakar Nacanabo. Les matériels sont notamment achetés auprès des nouveaux partenaires stratégiques du Burkina Faso.

Matériel militaire chinois

La Chine a renforcé sa coopération militaire avec le Burkina Faso ces dernières années, devenant l'un des principaux fournisseurs d'équipements militaires du pays. Les accords entre les deux pays s'inscrivent dans le cadre de la Belt and Road Initiative, avec des investissements dans plusieurs secteurs, y compris la défense :

Matériel militaire russe

La Russie et le Burkina Faso ont renforcé leur coopération militaire ces dernières années, avec des accords visant à augmenter les livraisons d'équipements militaires et le déploiement d'instructeurs russes :

Matériel militaire turc

La Turquie a renforcé sa coopération militaire avec le Burkina Faso, notamment en fournissant des systèmes de drones de combat de dernière génération. Ces livraisons s'inscrivent dans le cadre d'un partenariat stratégique entre les deux pays.

Des matériels militaires qui pourraient servir aux terroristes

Lors de l’attaque de Djibo par le JNIM, le 2 février 2025, les soldats burkinabè ont abandonné un « battle-wagon », un camion cargo militarisé, après l’offensive éclair des terroristes. Des images partagées sur les réseaux sociaux montrent ce véhicule, équipé de protections balistiques et de supports pour mitrailleuses, désormais utilisé par les jihadistes pour leurs propres assauts.

Outre les véhicules, les djihadistes s’emparent également massivement d’armes légères lors de leurs assauts. Durant la même attaque de Djibo, ils ont capturé des fusils Type 56 (copies chinoises de l’AK-47), des mitrailleuses Kalachnikov (PK), des lance-roquettes RPG-7, et des stocks de munitions.
Les sources ouvertes, révèlent que ces prises incluent aussi des équipements de communication tactique, des gilets pare-balles et des jerricans de carburant. Ces saisies permettent aux groupes armés terroristes de renforcer leurs capacités militaires et monter des embuscades complexes.

Ces dynamiques alimentent un marché noir régional d’armes, où les groupes armés revendent une partie du butin pour financer leurs activités. Les pertes matérielles sapent les efforts de modernisation de l’armée burkinabè, financés par des partenaires comme la Russie ou la Chine. Les causes de ces pertes sont multiples. Les défauts de maintenance des véhicules lourds, comme les camions Shacman ou les blindés turcs, sont souvent négligés en contexte de crise, ce qui les rend vulnérables aux attaques. Des fuites d’informations au sein des FDS pourraient permettre aux groupes jihadistes de cibler les dépôts d’armes les moins sécurisés.
Les matériels de guerre livrés au Burkina Faso par la Chine, la Russie et la Turquie, bien que destinés à renforcer les capacités militaires du pays pour lutter contre le terrorisme, risquent donc de finir aux mains des groupes terroristes. La fragilité des structures militaires et la porosité des frontières dans la région sahélienne exacerbent ce phénomène, soulignant la nécessité d'une stratégie sécuritaire plus robuste pour protéger ces équipements et prévenir leur détournement par les groupes armés.